Je n'ai aucun sens de la nuance

J'ai une équipe de quatre personnes. Ou plutôt devrais-je dire que le service est constitué de quatre collaborateurs. Car il ne s'agit en rien d'une équipe, ni même d'un groupe. Ce sont quatre individus réunis par le caprice d'un ancien responsable. Sur les quatre, je dirais qu'il y en a trois qui n'ont rien à faire là. C'est beaucoup.
Commençons par A. : 31 ans et "un ego démesuré". Du moins est-ce la description qui me revient le plus souvent à son sujet. L'équipe voisine l'a baptisée "Princesse". A. ne jure que par l'écriture inclusive et le point médian, ce qui déjà me gave à un point que je ne saurais vous dire. En effet, comme le faisait remarquer Françoise Héritier, écrire (par exemple) "grâce aux agriculteur.rice.s" c'est toujours faire passer le féminin APRÈS le masculin.
Sans compter que son féminisme jaloux se double curieusement d'une rejet des "vieux" (en gros, des plus de 40 ans) assez féroce.
Mais discriminer est toujours discriminer et je ne vois pas plus de justification à discriminer une moitié de l'humanité pour son âge que pour son sexe.
Lorsque j'ai fait sa connaissance il y a quelques mois et ressenti mes premiers doutes sur ma capacité à éprouver de l'empathie à son égard, je me suis dit "ça y est, nous y voilà : tu arrives à l'âge où tu deviens jaloux des jeunes de ton espèce avides de succès et où tu vas toi-même, par un curieux retour des choses, contribuer à leur barrer la route..." Puis j'ai travaillé avec Julie-de-la-communication, à peine 25 ans. Une crème. Et grâce à Julie, j'ai compris que le problème ne venait peut-être pas que de moi.
Ou alors, c'est parce que je n'ai aucun sens de la nuance ? C'est ce que m'a expliqué A. : je manque de nuance. Je reste "à la surface des choses" tandis qu'elle dont "le métier est l'innovation" (et qui a un doctorat, je me dois de vous le dire étant donné qu'elle-même le fait largement savoir, pour ne pas dire sentir) sait aller dans la "profondeur".
Personnellement, avec l'absence de nuance qui me caractérise (j'ai aussi un doctorat mais je crois que ça n'a rien à voir...), je souhaiterais qu'elle y demeurât (un jour il faudra que je vérifie si cela se dit ainsi, mais en tous cas c'est joli).
Le drame, c'est que Julie s'en va, la boîte n'ayant pas jugé opportun de la garder à l'issue de son contrat précaire. Tandis qu'A. reste.

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